mon cher Gilbert:
L'UQAM veut s'étendre vers l'ouest
Stéphane Baillargeon ,
Marie-Andrée Chouinard
Édition
du vendredi 28 octobre 2005
Mots clés : uqam, Montréal, métro saint-
laurent, Éducation, îlot balmoral
L'îlot Balmoral et le métro Saint-Laurent sont dans sa mire
L'expansion de l'UQAM ne se limitera pas à rebâtir l'îlot Voyageur et la gare d'autobus: toujours en quête d'espace, l'université montréalaise a aussi dans sa mire la station de métro Saint-
Laurent et l'îlot Balmoral, voisin de la Place des Arts.
Pour donner de la visibilité à son campus clairsemé dans la portion est du centre-ville, l'université fait aussi mousser le projet d'un «axe est-ouest» sur le boulevard de Maisonneuve, où seront déployés des «parcs étudiants», des bornes informatiques et des éléments architecturaux éclairés aux couleurs de l'institution.
Ces grands axes de développement constituent le coeur du tout nouveau Plan directeur immobilier de l'Université du Québec à Montréal, dont Le Devoir a obtenu copie. Ce document expose les intentions futures de l'établissement pour répondre à un manque de locaux, fixé à 52 000 mètres carrés d'ici 2008-09, mais il insiste aussi sur un «déficit d'identité» lié à la dissémination de ses bâtiments à travers le centre-ville. Le plan devrait être adopté sous peu par le conseil d'administration de l'université.
L'analyse, truffée de modélisations virtuelles, désigne clairement des «occasions immobilières» que l'institution convoite, dont le terrain situé au-dessus de la station de métro Saint-Laurent.
Cet espace, situé à l'intersection des boulevards Saint-Laurent et de Maisonneuve, semble d'autant plus libre pour l'université que le projet de musée juif de Montréal est maintenant abandonné, selon d'autres informations obtenues par Le Devoir. Le centre de commémoration de la présence juive dans la métropole, en développement depuis 2004, souhaitait occuper le terrain vague de la «Main», qui appartient toujours à la Ville de Montréal.
«Le projet de musée juif de Montréal n'existe plus depuis quelques mois», explique l'architecte Michel Ange Pazini, chargé par deux mécènes d'élaborer des plans pour l'établissement muséal. «Je pense que les promoteurs ont été refroidis par les lourdeurs administratives de la Ville et par des pressions de la communauté juive, qui craignait de voir disparaître dans ce projet de l'argent d'oeuvres caritatives.»
Sur l'îlot Balmoral, angle de Bleury et de Maisonneuve, l'UQAM propose de s'associer au promoteur qui sera retenu par le concours lancé par la Société immobilière du Québec. L'université a d'ailleurs clairement établi ses intentions auprès du bras immobilier du gouvernement. Le vaste terrain pourrait aussi accueillir en même temps un énième projet pour les conservatoires d'État (musique et théâtre) et une nouvelle salle de l'OSM.
En rêvant de s'agrandir dans ces deux zones, l'institution universitaire vise un développement linéaire moulé au trajet souterrain de la ligne verte du métro (Honoré-Beaugrand-Angrignon), de Berri-UQAM à Place-des-Arts, avec un saut à Saint-Laurent, le tout longeant le boulevard de Maisonneuve.
«L'UQAM est née sur une station de métro et poursuit son développement autour du métro, dans un axe est-ouest», observe le professeur Luc Noppen, titulaire de la chaire de recherche sur le patrimoine urbain de cette université et membre du comité consultatif du recteur sur le développement du tout récent campus des sciences.
Selon le directeur des investissements de l'UQAM, cette phase d'expansion entreprise par l'université s'est déployée avec l'arrivée, il y a quatre ans, du recteur Roch Denis. «M. Denis voudrait que son institution soit représentée partout en construisant des pavillons», explique Nicolas Buono, rencontré la semaine dernière. «Il m'a donc demandé un plan directeur.»
L'établissement s'affirme déjà, et très fermement, comme le plus grand joueur immobilier du secteur. Il apporte la dernière touche à son complexe des sciences UQAM-Pierre-Dansereau dans le quadrilatère formé par les rues Saint-Urbain, Président-Kennedy, Jeanne-Mance et Sherbrooke. L'institution rénove et achète aussi. Elle a récemment acquis l'ancienne permanence du journal La Patrie et la bibliothèque Saint-Sulpice, dans le Quartier latin.
Elle poursuit en même temps le projet d'un institut Santé et Société ainsi que l'agrandissement de la bibliothèque centrale et de son centre sportif. Parallèlement à ces travaux, le réaménagement de certains de ses pavillons d'origine lui permet d'entrevoir la possibilité d'investir des locaux au rez-de-chaussée du pavillon Hubert-Aquin ainsi que dans le pavillon V (Sainte-Catherine Est) dans le but d'y établir des commerces.
«Mais nous ne sommes pas seulement confrontés à un problème d'espace», poursuit M. Buono. «Il faut aussi mieux se positionner, il faut faire du "branding", s'assurer que l'UQAM soit reconnue pour la place qu'elle occupe dans la ville et dans la société.»
Le plan directeur expose clairement cette intention de s'afficher dans la ville. Le programme envisage plusieurs moyens inédits, par exemple la création de «placettes étudiantes» le long de l'axe est-ouest, de petites zones extérieures connectées au réseau Internet sans fil, décrites comme des «lieux de détente, d'échanges et d'identité UQAM».
Ces petites places seraient installées sur les espaces verts liés au site des Habitations Jeanne-Mance en plus des parcs Émilie-Gamelin, du Barry et Eugène-Lapierre. Le plan prévoit d'exposer clairement une «marque UQAM» à travers «l'ajout de mobilier urbain signalétique et d'éléments d'éclairage».
La cheminée de l'ancienne fonderie, partie intégrante du Complexe des sciences, sera d'ailleurs bientôt éclairée de la couleur bleue propre à l'UQAM. Le clocher de l'église Saint-Jacques, intégrée au pavillon Judith-Jasmin, et même la totalité du pavillon Président-Kennedy pourraient ensuite être illuminés.
L'institution songe également à ajouter dans le réseau souterrain et aux portes du métro de larges signalisations à ses couleurs afin d'annoncer l'approche d'un de ses pavillons, voire des oriflammes sur les façades des bâtiments. Elle n'exclut pas le recouvrement entier d'un mur avec un message institutionnel -- «Pour avancer, il faut prendre des décisions; prenez position», comme on peut le lire sur un des exemples cités dans le document -- de même que la coloration d'un pan de mur complet.
«Le seul bâtiment visible et facilement associé à l'UQAM actuellement, c'est le pavillon Président-Kennedy avec l'acronyme de l'université, observable de très loin», note M. Buono. «Ce n'est pas suffisant.»