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François Bourque
Le Soleil
Quatre tronçons d'autoroute menant aux centres-villes de Québec et de Sainte-Foy sont dans la mire du groupe de travail sur la mobilité durable, présidé par le maire Labeaume.
L'hypothèse: transformer ces autoroutes en boulevards urbains, pour favoriser le développement de nouveaux quartiers multifonctionnels près des pôles d'attraction.
Le groupe de travail a identifié quatre tronçons d'autoroutes dont la vocation pourrait changer :
>> 1 L'autoroute Charest, entre Robert-Bourassa et l'avenue Saint-Sacrement
>> 2 L'autoroute Robert-Bourassa, entre Quatre-Bourgeois et Hochelaga
>> 3 L'autoroute Laurentienne, entre le boulevard Hamel et le pont de la Croix-Rouge
>> 4 L'autoroute Dufferin-Montmorency, entre François-De Laval et le Domaine Maizerets.
Ces tronçons totalisent environ six kilomètres. Ils ont en commun d'être à l'extrémité d'une autoroute et de se terminer à des feux de circulation; ce sont les autoroutes qui s'enfoncent le plus loin dans le ventre de la ville; aucun de ces tronçons n'est essentiel au réseau de voies rapides de la région de Québec, comme l'autoroute de la Capitale, Henri-IV ou l'autoroute 20.
Mais c'est surtout que ces tronçons d'autoroute traversent des quartiers peu habités ou pas du tout et offrant un grand potentiel de développement.
Ouvrir ces quartiers à l'habitation grâce à des artères plus conviviales pourrait inciter des citoyens à se rapprocher de leur lieu de travail ou d'études.
Cela pourrait aider à réduire les déplacements en voiture et à lutter contre l'étalement urbain et la pénurie appréhendée de terrains à construire à Québec.
Les plus audacieux rêveraient même de remplacer le viaduc Robert-Bourassa-Charest par un feu de circulation, voire un grand carrefour giratoire. Ils pousseraient même leur luck jusqu'à démanteler le tunnel sous le chemin Sainte-Foy pour remettre à niveau tous les terrains du secteur.
Oubliez ça! Les coûts seraient astronomiques.
L'hypothèse d'une transformation plus modeste de Robert-Bourassa entre Quatre-Bourgeois et Hochelaga est certainement plus vraisemblable.
L'idée de renoncer à des tronçons d'autoroute rallie actuellement plusieurs membres du groupe de travail sur la mobilité durable. Aucune orientation définitive n'a cependant été prise encore, ni sur les autoroutes, ni sur le plan d'ensemble pour la circulation et l'aménagement.
Le maire Labeaume dit ne pas vouloir bousculer les choses. «C'est trop majeur» pour prendre le risque de se «casser la gueule», dit-il.
Il reconnaît avoir sous-estimé au départ l'importance de réfléchir à l'aménagement lorsqu'on veut parler de plan de mobilité.
Voici quand même ce que M. Labeaume disait du comité sur la mobilité lors d'une rencontre éditoriale au Soleil, il y a quelques semaines : «Les réunions du comité de mobilité, c'est de l'intelligence pure; le monde qui est là est brillant.»
Dans l'éventualité où l'administration Labeaume se laisserait convaincre par l'idée des boulevards urbains, elle risque de trouver sur son chemin le ministère des Transports du Québec (MTQ).
Celui-ci est habituellement assez jaloux de ses voies rapides. Il a fallu des années pour que le ministère accepte de démanteler quelques bretelles inutiles de l'autoroute Dufferin-Montmorency. Imaginez renoncer à des sections entières d'autoroute.
Ce serait alors une véritable révolution dans la gestion des transports et de l'aménagement du territoire à Québec. Sauf que nous sommes encore loin du compte.
Le premier réflexe du ministère est jusqu'à nouvel ordre de réinvestir dans ses autoroutes et viaducs plutôt que de les démanteler.
Pendant que des visionnaires d'un nouvel urbanisme rêvent de boulevards, le ministère vient de commencer la reconstruction à neuf du viaduc Charest-Robert-Bourassa. Un projet de 250 millions $ sur quatre ans.
Avant de s'y engager, le ministère n'a jamais envisagé une autre option qu'un viaduc.
La Ville de Québec non plus d'ailleurs, qui a collaboré étroitement avec le MTQ pour préparer les plans de ce qui deviendra le plus grand chantier routier des prochaines années à Québec.
La Ville a demandé et obtenu que le ministère réserve une travée centrale sur Robert-Bourassa pour le transport en commun, mais personne n'a envisagé le démantèlement du viaduc.
Chaque jour, 75 000 voitures roulant sur Robert-Bourassa croisent les 50 000 voitures qui roulent sur Charest. Aucun feu de circulation ou carrefour giratoire ne pourrait absorber un tel volume de circulation, estiment les experts du transport.
À moins que les choses s'accélèrent, les travaux du comité sur la mobilité durable aboutiront sans doute trop tard pour avoir une incidence sur l'intersection Charest-Robert-Bourassa. Il faudra faire avec.
Dans quelques années, on se dira peut-être qu'il aurait mieux valu arrêter les travaux pendant qu'il en était encore temps.
Sauf qu'il est difficile de présumer aujourd'hui des conclusions auxquelles arriveront le comité et la Ville.
De toute façon, il sera encore possible de changer la vocation de tronçons d'autoroute même après la reconstruction du viaduc, si jamais la Ville et le ministère en décidaient ainsi.
La «théorie des noeuds»
Une ville n'est pas une figure géométrique avec un noyau dur au centre-ville et des banlieues tournant autour en parfaits cercles concentriques avec une densité déclinant à mesure qu'on s'éloigne du centre.
Une ville est plutôt faite de plusieurs pôles d'activité éparpillés sur le territoire. Encore plus peut-être lorsqu'une ville est, comme Québec, le résultat de fusions successives.
On trouve ainsi plusieurs petits ou moyens centres-villes qui trouvent leur explication dans l'histoire ou dans les choix politiques de l'époque.
Avec pour conséquence que ces pôles d'activité n'ont pas nécessairement de cohérence au plan de l'aménagement et des déplacements.
L'objectif de Québec est d'améliorer cette cohérence par un meilleur plan d'ensemble.
Le maire Labeaume évoque ici la «théorie des noeuds», une des hypothèses sur la table du comité sur la mobilité durable.
Il y a dans une ville quatre ou cinq noeuds, décrit-il. Des pôles d'attraction forts dont il faut tenir compte pour l'aménagement et les transports.
Le plus évident, croit-il, est celui de l'Université Laval, des cégeps, hôpitaux, centres commerciaux et bureaux du centre-ville de Sainte-Foy. Une sorte de «noeud universel».
Les autres? Ce pourrait être ExpoCité, D'Estimauville, Saint-Roch-centre-ville.
Un des scénarios serait de développer la ville autour de ces noeuds. De créer une fluidité de transport des périphéries vers ces noeuds et une fluidité de «noeud à noeud». «Ça pourrait être ça, mais ça pourrait aussi être autre chose.»
Comment assurer cette fluidité? La Ville ne sait pas encore. Il fut un temps où le maire ne voulait rien entendre des tramways. Aujourd'hui, il n'écarte plus aucun moyen, pourvu que ça puisse emmener du monde en ville.
Le seul moyen qui semble désormais exclu, c'est une expansion du réseau routier. «On n'ajoutera pas de nouvelles voies de circulation; ce n'est pas la solution, pas une minute», prévient le maire.
On parlera donc davantage de transport en commun. La priorité sera le lien entre les deux rives et tout ce qui va vers l'Université Laval, annonce le maire.
Pour le reste, la «théorie des noeuds» ouvre la porte à des axes de transports en commun peu envisagés jusqu'à maintenant.
Par exemple, un train léger sur le boulevard Hamel depuis Saint-Augustin, lance-t-il. Ou un train léger depuis la Côte-de-Beaupré jusqu'à D'Estimauville. Un lien de transport structurant sur Charest pourrait aussi être envisagé, dit-il.
La réflexion ne fait que commencer.
Le groupe de travail sur la mobilité durable a été créé en janvier dernier par l'administration Labeaume. Il réunit une vingtaine d'élus et d'experts en transport, en aménagement et en développement économique issus du privé et d'administrations publiques. Pourvu d'un budget de 500 000 $, il a pour mandat de proposer à la Ville de Québec un plan de mobilité durable ainsi que des orientations de transport et d'aménagement pour les 25 prochaines années.
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>> 1 - L'idée la plus novatrice et la plus surprenante est celle qui transformerait en boulevard l'extrémité est de l'autoroute Charest, entre Robert-Bourassa et Saint-Sacrement. Il s'agit actuellement d'une zone industrielle et commerciale de faible densité, totalement dépourvue de toute qualité urbaine. Un secteur poche dont on avait toujours pensé qu'il pouvait difficilement être autre chose que poche et laid. À vol d'oiseau, cette portion de Charest est pourtant à moins d'un kilomètre des cégeps de Sainte-Foy et Garneau et de l'Université Laval. Et à quelques centaines de mètres à peine du Parc technologique, de l'autre côté de Charest. Le secteur a un potentiel indéniable pour devenir un quartier mixte avec de l'habitation.
Le Soleil, Jean-Marie Villeneuve
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>> 2 - La densification de Québec passera tôt ou tard par le plateau Saint-Denis à Sainte-Foy. Transformer l'extrémité sud de Robert-Bourassa en boulevard permettrait de désenclaver l'Université Laval et de la brancher sur ce quartier. Ce pourrait être l'occasion d'ailleurs de prolonger le boulevard Hochelaga à travers la Cité universitaire pour qu'il aille rejoindre René-Lévesque. Déjà à l'époque de la mairesse Boucher à Sainte-Foy, des projets de «requalification» de Saint-Denis avaient été soumis par l'École d'architecture de l'Université. Il allait de soi que l'idée reviendrait un jour à la surface. Outre le ministère des Transports, l'Université Laval et les Forces armées canadiennes seront sollicitées pour la relance de ce secteur.
Le Soleil, Jean-Marie Villeneuve
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>> 3 - L'extrémité sud de l'autoroute Laurentienne jouxte le secteur de la Pointe-au-Lièvre, dont l'administration Labeaume vient d'annoncer qu'elle souhaite faire un écoquartier. Transformer ce tronçon en boulevard urbain permettrait de désenclaver la Pointe-au-Lièvre et de faire respirer ce nouveau quartier et de lui donner une ouverture plus facile sur le grand parc Victoria de l'autre côté.
Le Soleil, Jean-Marie Villeneuve
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>> 4 - L'autoroute Dufferin-Montmorency traverse le secteur D'Estimauville, dont la Ville veut aussi faire un écoquartier. Un boulevard urbain faciliterait le lien entre ce futur quartier et la baie de Beauport, un souhait que caresse la Ville depuis longtemps, raison de plus depuis que le Port de Québec y a fait des travaux de réaménagement importants. Il restera encore le problème de l'autre obstacle que sont les voies ferrées, mais chaque chose en son temps.
Le Soleil, Jean-Marie Villeneuve
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